L'AVENTURE DE LA BOURBONNE

Il se trouva même dans la bande une chevalière d'industrie qui fit longtemps parler d'elle : La Dame , tomba au cœur de Février I799 chez Rousotte Martineau au Perrier . Enigmatique , jolie bien disante, gentiment toilettée d'atours qui n'étaient pas ordinaires au pays et qui annonçaient l'opulence , aux curieux qui cherchaient à pénétrer son secret , elle répondait tout modestement venir de très loin .., se nommer Marie Guillet .
Bientôt une autre bruit courut : l'étrangère descendue à l'auberge de la Martinelle cachait une Princesse Royale ; la Princesse Victor de Paris ou de Saint Denys !
Les fameux courtiers royaux s'emparèrent de l'affaire . Venant d'eux la rumeur trouva créance .Parmi les Maraîchins , c'est à qui offrirait asile à la " Fille de France ".Avec la meilleure grâce du monde , la princesse se rendit à ces prières et pilotée par ses guides parcourut galamment le dédale des eaux mortes

Après bien des péripéties ,on la voit à l'automne I799 au Marais de Soullans aux Petites Rochelles , chez les frères Guittonneau qui faisaient valoir en communauté la ferme . C'était des gens d'antique droiture qui ne soupçonnaient pas qu'on put mentir . Liés à la cause royale par les risques de 20 combats et le sang de leur cadet ; Laurent Guittonneau , guillotiné à Nantes le 30-I2 -.I793 , la rouée princesse eut vite fait de savoir quelle corde il fallait tirer pour faire vibrer de tels hommes...
Elle se dit :"filleule du feu Louis XVI ....femme du Dauphin , nommé ,Roi d'Espagne., poursuivie , errante , elle va devant elle , toujours traquée .. de son heureux passé , il ne lui reste que ses titres en une valise et quelques louis d'or confié au bissac de Jacques Bonnin , son guide . En une aussi cruelle infortune elle, n'attend rien que de l'honneur maraîchin .
Pour invraisemblable qu'elle fut , l'histoire parut naturelle aux Guittonneau . Ils ouvrirent leur maison et de ce jour l'aîné, l'héroïque boiteux , se fera avec une admirable candeur le garant et le pourvoyeur de la coureuse de grands chemins !
De leur refuge des "Petites Rochelles ",la princesse et son guide se mirent à villager de long en large dans tout le marais . On les verra à la Pérouaille se faire régaler pendant I5 jours et donner sa main blanche à baiser à Pierre Robin le métayer et lui dire emphatiquement :
Ma main la plus petite de la maison est néanmoins la plus grande
Et extorquera au pauvre Robin vingt pistoles en présence du noble Boiteux qui se porte caution ..! Une autre fois elle empruntera à Julien Conant , agent d'affaires de Mr Leroux de Commequiers ? maître des Petites Rochelles et de dix autres ferme acquises de la Nation : 50 écus .Chez François Leguay marchand en rouennerie au Bourg de Soullans , la princesse se fera auner pour six pistoles de toile et de drap qu'elle emporte à crédit , promettant de payer quand elle aura trouvé changeur de sa monnaie espagnole ... Au Perrier , à Rié , St Hilaire , ses agissements et ses dupes ne se comptaient plus
Tant va au puits le canau qu'il se fêle
..assure le dicton du marais
Les yeux enfin désillés aperçurent la friponnerie ..Au printemps de I80I( seulement) , indignés ,les Guittonneau bannirent la voleuse et son intendant :Jacques Bonnin ..De son fameux bissac au trésor et aux titres de noblesse n'avait-on pas retiré un lourd paquet enveloppé d'un grand mouchoir rouge de priseur :une belle pierre de grison ! ..SimplementArrêtée enfin , elle sera condamnée le 2 Septembre I802 à trois mois de prison .Jacques Bonnin ,son complice, ne sera pas inquiété
La Princesse Bourbonne :"Jeanne Ursule Marie Antoinette , princesse de Paris et, de Condé "'...était une vulgaire fille d'auberge native d'Auvernay le Petit près de Chateaubriant et s'appelait : Antoinette Cornuailles

Nos braves Anciens s'étaient faits avoir !

NOUVELLE INSURECTION DU MARAIS

Entre temps nous sommes au début de I799 : toujours pas de prêtre et d'église à Soullans ..Et tout le Marais aspirait après ces beaux dimanches et avait la nostalgie de sa Messe . La question religieuse n'était pas loin de fomenter une nouvelle insurrection !
Cette nouvelle insurrection ( la dernière de la Révolution ) allait soulever non seulement le Marais mais tout l'Ouest: de la Bretagne à la Gâtine .
Les paysans en effet jusque là amis de la paix se demandant si l'heure n'est pas venue de décrocher les fusils pour retrouver ces beaux dimanches et cette Messe dont la nostalgie les tourmente ... Obscur débat qui les tourne d'instinct vers les chef qu'ils laissaient se démener seuls depuis quatre années ..Dans la nuit du 20 au 2I Octobre I799 , 2000 soldats avec le conte Godet de Chatillon pénètrent par surprise au cœur de Nantes . L'aubergiste Lecouvreur , ancien divisionnaire de Charette secondé par Voyneau du Bourg sous la Roche se porte sur le marais qui l'attire avec Pierre Nicollon des Abbayes natif de Landeronde qui se trouve à la tête de 400 fantassins et de 50 cavaliers . A la Toussaint , ils sont à Apremont ou ils perdent 9 homes .Un autre détachement prend Machecoul . Challans est aux abois et le II Novembre le District défend aux maraîchins de prêter leurs yoles aux Rebelles et aux suspects .Il était bien temps le lendemain (I2 Nov.I799) toute la Division Lecouvreur se concentrait à Soullans ou elle trouvait armes , vivres , chevaux et 60 recrues de la paroisse . Sans coup férir , le Marais était ouvert et quelques jours après l'armée royaliste, y réunissait 2.000 hommes !
C'est un tel enthousiasme que l'armistice du 24 Nov. arrêté entre Vendéens et Républicains leur est lettre morte . Le I5 Décembre , ils pourchassaient encore le général Travot de Sallertaine à St Gilles .Le IO Janvier I800 , c'était au tour de Challans de se voir investi par 600 gars avec à leur tête Nicollon des Abbayes ..C'était 8.jours avant le traité de Montfaucon . Le moment était mal choisi , les Colonnes de Travot bien en forme , culbutèrent tambour battant les audacieux maraîchins sur Sallertaine . Une centaine se rendit à merci . Les autres fièrement prirent le marais au blanc . Plusieurs s'y noyèrent .
Cet accès de fièvre ... fut le dernier du Marais guerrier .

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